Un peu épuisée de regarder en boucle Friends pour la 83ème fois, nous nous sommes lancés dans un rewatch de How I met Your Mother (2005-2014) dont nous n’avions pas gardé un souvenir impérissable lors de sa diffusion initiale.
Et pourtant, lors de ce second visionnage, la série nous est apparue beaucoup plus réussie, innovante, mature et présentant deux personnages féminins finalement bien plus creusés, profonds et graves que ne l’étaient les personnages de sitcoms de l’époque.
D’où ce focus en arrière sur deux personnages iconiques de la pop culture, Lily Aldrin-Ericksen et Robin « Sparkles » Scherbatsky.
ATTENTION SPOILERS SI VOUS N’AVEZ PAS VU LA SERIE
Comme son nom l’indique, la série est avant tout l’histoire d’un père qui raconte à ses enfants comment après de TRÈS nombreuses vicissitudes, ce grand romantique a fini par rencontrer leur mère alors que le destin ne cessait de les faire se frôler sans jamais se voir vraiment. Mais comme le fait remarquer la fille dans le dernier épisode de la série, il n’est finalement que peu question de leur mère
Quand How I met your mother débarque sur les écrans de CBS en septembre 2005, la télévision américaine est orpheline depuis 1 an de sa plus grande sitcom et l’une des plus aimées : Friends. Il n’est pas étonnant que la petite nouvelle avec sa bande de potes new-yorkais joue sur cette nostalgie jusqu’à mettre ses héros sur un canapé ou dans un taxi jaune sur le poster promo. C’est le produit d’appel mais en vérité How I met Your mother et Friends n’ont pas grand chose en commun en dehors de leur pitch.
Il nous coûte de le dire en bonne Friends addict que nous sommes mais HIMYM est beaucoup plus travaillée, bien plus écrite en terme d’arc narratif et cela se ressent pleinement dans le développement des personnages sur 9 saisons (10 pour Friends).
Cette fois, pas d’égalité parfaite , il n’y a que deux femmes pour 3 hommes et surtout un parti pris romantique qui les implique toutes les deux dès le départ.
Ainsi le pilot permet l’introduction de Robin comme love interest du héros (rôle dédié qui ne la quittera en fait jamais malgré les ruptures, les mariages, les autres compagnes et compagnons de route) et sa présentation aux autres membres du groupe.
C’est à travers les yeux de Ted que l’on appréhende Robin quand il croise son regard au bar et tombe directement sous le charme. Elle apparaît alors comme une Girl Next Door parfaite alors qu’elle est en fait tout l’opposé. Le personnage mettra clairement plus de temps que Lily à s’imposer parce qu’elle arrive aussi dans un groupe déjà formé.
Robin c’est cette belle canadienne que l’on vanne continuellement pour ça qui vit avec 5 chiens et rêve d’une brillante carrière de journaliste. Elle va en avaler des couleuvres, enchaîner les postes pourris y compris à l’autre bout du monde mais elle finira par atteindre son objectif. Car sa carrière est ce qui prime dans sa vie.
Elle n’en fait pas mystère et explique dès le départ à ses nouveaux amis qu’elle ne veut pas se marier, elle ne veut pas d’enfants, elle ne veut pas se poser, elle veut tout mettre en oeuvre pour vivre son rêve.
Début des années 2000 dans une sitcom sur une grande chaîne américaine, les femmes comme Robin ne courent pas les séries. Certes le concept de la célibattante bat alors son plein mais Robin ne rentre même pas dans cette catégorie. Elle est juste une femme libre qui entend le rester quitte à passer à côté des « choses de la vie normale ».
Il y a quelque chose de dichotomique chez ce personnage qui continue d’aller vers des situations qu’elle ne désire finalement pas vivre : elle se met en couple avec Ted tout en sachant très bien que cette relation a une date de péremption, elle épouse Barney alors qu’elle ne croit pas dans le mariage (et lui non plus d’ailleurs). Ce qui est le plus significatif du caractère ambivalent de Robin (et c’est aussi un très bel épisode), c’est quand elle découvre qu’elle ne pourra jamais avoir d’enfants. Elle n’en a jamais voulu mais le simple fait de ne pas en avoir la possibilité la rend terriblement triste.
Pourquoi ? Parce que Robin continue de faire partie de ces femmes qui ont atteint leur objectif, qui savent qu’elles ne pourraient pas supporter une vie de famille mais qui en leur for intérieur finisse quand même par le regretter.
Il faut aussi comprendre que son passé familial est particulier avec une mère absente et un père regrettant de ne pas avoir un fils et qui a donc élevé Robin comme un garçon. Etre lâchée en pleine forêt le jour de son anniversaire pour se « confronter à la nature » (cadeau de Papa) a très certainement tanné le cuir de la jeune Robin.
Qui en signe de rébellion deviendra une vedette de la chanson et de la télévision canadienne sous le nom étincelant de Robin Sparkles ! Quand on vous dit que cette fille, c’est tout et son contraire !
Le bro parfait pour Barney qui boit du scotch, adorent les armes, le hockey et fume des cigares mais aussi la petite amie idéale d’un Ted énamouré qui ne cessera de l’être.
Que ces deux-là finissent par se retrouver une fois que leur première vie est terminée (elle a divorcé, il est veuf, ils ont la cinquantaine) n’est que justice finalement et évite à l’un comme à l’autre de passer à côté de l’amour de sa vie.
Retour au pilot. Pendant que Ted flashe sur Robin au MacLarens, dans l’appartement qu’ils partagent avec Ted, ses deux meilleurs amis, Marshall et Lily, fraîchement fiancés fêtent l’événement à même le lino de la cuisine.
Ces deux-là sont l’archétype du couple fusionnel qui ne se quitte pas depuis cette première année à la fac où elle a frappé à sa porte pour lui demander de l’aide avec sa chaîne hi-fi (ça ne s’est en fait pas vraiment passé comme ça !).
Malgré ses imposants presque 2 mètres, Marshall est un gros nounours écolo, fan de fantôme et du yeti qui prêche pour un monde meilleur. Sa rencontre avec Lily est pour Ted le signe du destin car ni lui ni le téléspectateur n’aura de doute sur le fait que Marsmallow et LilyPad passeront leur vie ensemble, auront des enfants, des petits enfants et mourront probablement dans les bras l’un de l’autre.
Avec un plot pareil, comment réussir à faire exister Lily par elle-même ? C’est tout le défi qui sera vaillamment relevé par les deux créateurs de la série et leurs scénaristes.
Car oui, Lily va non seulement exister comme personnage à part entière tout en vivant sa relation avec Marshall mais elle va en plus s’imposer comme la mère du groupe, celle qui donne les bons conseils, celle qui réprimande gentiment ou pas (hein Barney !), celle qui écoute et qu’on écoute, celle qui a souvent raison.
Son évolution est assez impressionnante sans doute plus que celle de Robin mais pour des raisons toutes différentes.
Toute jeune institutrice qu’elle soit, Lily a une poigne de fer qu’elle exerce autant avec les enfants de sa classe qu’avec son entourage et en vieillissant, ce trait de caractère prendra une nouvelle forme. Elle est bienveillante mais stricte et encline à la revanche.
Mais ce métier qu’elle aime n’est pas sa passion. Ce que Lily veut vraiment faire de sa vie c’est peindre et en vivre. Eventuellement, elle trouvera un compromis à son rêve en devenant la conseillère spéciale d’un riche acquéreur mais au début son rêve la poussera à remettre en question par deux fois sa relation avec Marshall. La première fois, quelque temps après leur fiançailles, elle le quitte pour aller vivre son rêve en Californie mais rien ne se passe comme prévu. La seconde fois, alors qu’elle se sait enceinte, elle fait le constat de l’impossibilité de réaliser finalement son rêve au profit d’une vie de famille.
HIMYM a beau être une sitcom, elle n’offre pas une vision rêvée de la vie et de ses choix parfois cornéliens encore plus quand on est une femme.
Aussi différentes soient-elles, Robin et Lily sont les meilleures amies possibles ce qui pour Robin tient du miracle étant donné son impossibilité à se lier avec des femmes.
Robin est d’ailleurs généralement détestée par les autres femmes de son propre aveu. Mais le caractère généreux de Lily fait qu’elle adopte tout de suite Robin. Celle-ci est en confiance et c’est ainsi que leur amitié va naître tout naturellement.
Bien sûr elle sera mise à mal de temps en temps, par les changements de vie de l’une et de l’autre et notamment la première grossesse de Lily (la peur de l’abandon de Robin refait surface) mais au final, Lily et Robin seront inséparables, la série jouant même sur une attirance d’ordre sexuelle qui tient plus du gimmick qu’autre chose.
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